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Rabbi Feuillet hebdomadaire
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F – Paracha « Vayéshev »

N° 544 Paracha « Vayéshev » – 23 kislev 5766 – ב »ה

RAV DOV BIGON

CECI ETANT

DE L’OBLIGATION D’INTENSIFIER LA LUMIERE

Ce n’est pas par hasard que les « Parachot » ayant trait à Yossef se lisent précisément à ‘Hanouka car Dieu a opéré pour lui des miracles semblables à ceux qu’Il a faits pour nous à l’époque du Second Temple.

Jeté dans une fosse remplie de serpents et de scorpions, il en a été délivré. En vivant, en Egypte, parmi des gens corrompus qui avaient sombré dans le plus bas degré d’impureté, il est cependant resté intègre. De prisonnier, il est devenu vice-roi d’Egypte.

De même, à l’époque du Second Temple, notre peuple, spolié par les Hellènes (les Grecs, comme on le dit à tort), avait perdu son indépendance nationale et subissait les pressions de leurs dominateurs et des Juifs assimilés à la culture ambiante qui cherchaient à intégrer Israël dans l’empire, à lui faire perdre son identité juive, à lui faire oublier la Thora et la pratique des « mitsvot », pareil à un prisonnier jeté au fond d’une fosse obscure, entouré de serpents et de scorpions. Mais, par un miracle, les Asmonéens l’emportèrent, « petite poignée d’hommes contre une multitude, des faibles contre des forts » (passage de la Prière dite à l’occasion de « ‘Hanouka »)

Lorsque la guerre fut terminée, on alluma la « Ménora » (chandelier à sept branches du Temple), dévoilant qu’on passait des ténèbres à la lumière, éclat qui, de Jérusalem, continue à resplendir.

Ceci étant – Nous remercions l’Eternel non seulement pour les miracles qu’Il a faits naguère à cette époque mais aussi pour ceux qu’il fait également aussi à la nôtre (inspiré de op. cit.).

Nous devons sortir de notre torpeur et voir les grands miracles que Dieu nous fait, concernant notre Délivrance, en particulier. Après deux mille ans d’exil dans la fosse obscure emplie de serpents et de scorpions, nous existons toujours bel et bien, malgré les efforts exercés par les nations et les religions pour nous persécuter et, à Dieu ne plaise, pour souiller l’âme de notre nation.

A l’instar de Yossef, nous sommes passés « du plus bas au plus haut », pour reprendre l’expression de nos Sages, de l’Etat, pauvre, d’abord, mais qui, peu à peu, est devenu une grande puissance économique et militaire.

Mais la réussite matérielle ne suffit pas, il faut vivifier notre identité juive spirituelle et morale. Nous sommes intimement convaincus que « le caractère d’éternité d’Israël ne sera jamais pris en défaut » (Sam. I XV, 20) et que les tentatives visant à faire disparaître notre identité, notre singularité et notre vocation de « peuple éternel » destiné à éclairer l’humanité, que ces tentatives n’aboutiront pas et qu’elles ne parviendront pas à éteindre la flamme de notre peuple.

Mais nous devons intensifier davantage encore cette lumière, lumière de la Thora, de l’amour et de la foi, et reprendre pieds avec notre identité et notre destination que nous avions fidèlement préservées durant toutes les générations, c’est un impératif de l’heure.

Ainsi, nous verrons apparaître, de Sion une lumière, nouvelle (d’après « Bénédictions du « Chéma », rituel des prières ashkénaze) au plus vite, de nos jours, « Amen ».

Joyeuse fête de ‘Hanouka !

Dans l’attente de la Délivrance pleine et entière.



RAV SHLOPMO AVINER

DISCUSSION AVEC UN JAPONAIS


Voici un récit authentique d’il y a quelques quarante ans, je m’en souviens comme si c’était hier. A l’époque, j’étais membre du kibboutz « Sdé Eliyahou », dans la vallée de Beth Shéan.

J’attendais l’autobus à Beth Shéan, il avait du retard. A côté de moi était assis un Japonais.

« Que faites-vous ? » Lui demandais-je.
« Je suis venu passer un an en Israël pour apprendre l’Hébreu ».
« Qu’avez-vous à faire de l’Hébreu ? »
« Etudier la bible ! »
« N’y a-t-il pas de Bible en Japonais ? »
« Si, mais en Japonais ce n’est pas ça ».

Il sortit de son sac une bible aux bordures dorées.

« Effectivement, ce n’est pas ça ! » Dis-je après avoir jeté un coup d’œil sur le livre. Tout en parlant, je remettais la poche des téfilin dans mon sac.
« Moi aussi j’ai des téfilin ».
« Qu’en faites-vous ? » Lui demandais-je avec étonnement.
« Je les mets ! Que peut-on faire avec des téfilin ? »
« Mais pourquoi les mettez-vous ? »
« Parce que c’est écrit dans la Bible ! »
« Quoi ! Vous faites tout ce qui est écrit dans la Bible ! » Lui répondis-je avec un regain d’étonnement.
« Et alors ! Pourquoi c’est écrit ? »

« Il a raison », me dis-je.

– « Avez-vous un tallit ? »
Bien sûr ! »
« Et un « tallit kattan » aussi ? »
« Non ».

« Dilettante », pensais-je.

Au Japon, pratiquez-vous le commandement de demeurer dans la souka ? »
« Bien sûr ! »
« Comment vous procurez-vous des « matsot » ? »
« Par la poste ! » Dit-il en me regardant comme si je sortais de la préhistoire.
« Gardez-vous Shabbat ? »
« Quelle question ! »
« Où habitez-vous ? »
« Au kibboutz « ‘Heftsi-Ba ».
« Les autres le respectent-il aussi ? »
« Non, je suis le seul ».
« Que faites-vous durant tout ce jour-là ? »
« Je me recouvre du tallit, je prie et j’étudie la Bible ».
« Etes-vous juif ? » Lui dis-je, pour en arriver à la question qui me brûlait les lèvres.
« Non. Il n’est pas écrit dans la Bible qu’il faille l’être ». Répondit-il innocemment.

Il a raison. Nulle part il n’est dit : « Dieu dit aux enfants d’Israël : « Vous serez juifs ». La Thora a été donnée à ceux qui, d’emblée, l’étaient.

« Brave Japonais ! » Pensais-je. Il recevra de Dieu sa récompense, non pas comme « pratiquant parce qu’il en a reçu l’ordre » mais comme « pratiquant bien que ne l’ayant pas reçu » (passim » (hors mis le respect du Shabbat et la pose des téfilin) (Maïmonide, « Hilkhot Mélakhim » X, 15 ; Radbaz »), mais il n’est pas juif. Par contre, les membres de son kibboutz, qui le sont, ne pratiquent pas Shabbat ! En réalité, ce ne sont pas les « mitsvot » qui font le Juif mais inversement. D’abord Dieu a choisi le peuple d’Israël, ensuite, par amour, Il leur a donné les « mitsvot » (ibid. « Hilkhot Avoda Zara » I, fin). On n’accède pas à sa nature par leur intermédiaire mais c’est par elles qu’on la dévoile. C’est pourquoi, enseignait le Rav Tzvi Yéhouda, avant d’étudier on ne dit pas : « Qui nous a donné Sa Thora et nous a choisis d’entre tous les peuples », ce qui aurait donné lieu à croire qu’essentiellement notre spécificité émanerait de la pratique des mitsvot, et que si on ne les pratiquait plus on ne serait plus juif, ce qui est un fondement de la théologie chrétienne. Au contraire, on dit d’abord : « Qui nous a choisis d’entre tous les peuples » ; ensuite, « et nous a donné Sa Thora ». En d’autres termes, c’est en notre qualité de « peuple spécifique », de « prêtres » et « saint » que Dieu nous a donné la Thora, parce qu’Il nous aimait, comme on le témoigne quotidiennement dans la Prière du Matin (« Bénédictions du « Chéma »).

On a enseigné : « On ne part pas de la Thora pour arriver à Israël mais l’inverse ». Dans cet esprit, « Le « Baal Shem Tov » étreignait chaque Juif parce qu’il voyait en lui une lettre de la Thora. Notre Maître, le Rav Kook, étudiait la Thora parce qu’il voyait dans chaque lettre une étincelle de l’Ame d’Israël », approches qui ne sont pas contradictoires.

Actuellement, on doit plus que jamais répéter cet enseignement. Si une partie du peuple n’a pas accès à la Thora, c’est une partie de la Thora qui nous est refusée.

Par-delà tous nos griefs, nous devons constamment avoir à l’esprit que nous formons un seul peuple, uni d’un même amour. Une vraie mère ne dira pas de son bébé « Coupez-le en deux » (cf. contexte, Roi I III, 23), et l’on doit fuir la controverse comme la peste. D’ailleurs, aux yeux des nations, elle est saisie comme blasphème (« Maamaré Haréiya », 452-454).

L’histoire abonde en exemples qui montrent comment les controverses ont eu des conséquences catastrophiques (la destruction du Temple, par exemple, par suite de la haine gratuite et des guerres intestines).

Nous ne devons jamais oublier que nos ennemis sont nombreux, de l’extérieur comme de l’intérieur, que les armes ne suffisent pas et que la fraternité des compagnons d’armes est indispensable. Par-là, nous ne voulons pas dire que l’amour dû à notre peuple est le garant de notre puissance, mais qu’il est un idéal sublime, condition de toutes les bénédictions. Il y a erreur optique à n’observer que les petits détails car ils cachent l’essentiel, Dieu qui réside parmi nous, (d’après Ex. XXV, 8), dans nos impuretés, précise Rachi (Ad loc.).

Se couper du peuple, enseignait Rabbi Ména’hem Mendel de Réminov, c’est se couper de l’Immanence (cf. « Olat Réiya » tomme II, 468).

Retournons vers le peuple, c’est un impératif de l’heure.


(Traduit et adapté par Maïmon Retbi, spécialisé dans les sujets kodech, hébreu/français)