N° 542 Paracha « Vayétsé » – 9 kislev 5766 –ב »ה
RAV DOV BIGON
CECI ETANT
LA NATION DEVOILE A NOUVEAU SA SPLENDEUR, SON ECLAT ET SA MAJESTE
A propos du verset : « Jacob quitta Beer-shéeva et se dirigea vers ‘Haran » (Gen. XXVIII, 10), Rachi explique : « La Thora aurait dû (uniquement) mentionner « Jacob se dirigea vers ‘Haran ». De la précision « quitta Beer-shéva » on apprend que le départ d’un juste a des incidences (sur le milieu qu’il vient de quitter). Tant qu’il demeure dans la ville, il lui donne sa splendeur, son éclat et sa majesté ; lorsqu’il l’a quittée, il lui retire ces qualités ».
En quittant Beer-shéva, Jacob reçoit de Dieu la promesse qu’il reviendrait avec bien plus de magnificence encore : « Soudain, il vit Dieu se tenant au-dessus de lui. [Dieu] dit : « Je suis l’Eternel, Dieu d’Abraham ton (grand) père, et Dieu d’Isaac. La terre sur laquelle tu reposes, Je te la donne à toi et à ta descendance. Tes descendants seront comme la poussière de la terre. Tu t’étendras à l’Ouest, à l’Est, au Nord et au Sud. Toutes les familles de la terre seront bénies par toi et par tes descendants » (ibid. 13-14).
De même, en partant en exil, notre peuple a laissé Eretz Israël en état de ruines pendant deux mille ans, perdant « sa splendeur, son éclat et sa majesté », attributs dont l’humanité a subi le manque, sombrant désormais dans les ténèbres de l’esprit et de la morale durant toute l’obscure période de l’Exil.
Ceci étant – En recouvrant son foyer national, notre peuple récupère peu à peu ces valeurs si longtemps éclipsées et vit la réalisation de la promesse d’Ezequiel de la résurrection nationale : « Je vous retirerai d’entre les nations, Je vous rassemblerai de tous les pays et vous ramènerai sur votre terre » (Ez. XXXVI, 24). Mais le stade du « rassemblement des dispersés » ne dévoile pas encore les qualités éclatantes ci-dessus mentionnées. Pour ce faire, la nation doit se purifier des scories de l’exil qui, d’abord, ont eu pour effet de ternir son identité et sa vocation de peuple élu, saint et de médiateur entre Dieu et l’humanité, pour le bien de tous. Souvent, nous avons dénoncé l’erreur de voir en Israël « un état comme les autres », sans plus, conception qui risquerait de remettre en question jusqu’à notre existence. Revenir sur notre terre ne suffit pas. Nous devons aussi nous retrouver, reconnaître notre spécificité intrinsèque et notre vocation de « Lumière des Nations » ce qui redeviendra manifeste lorsque nous aurons dépassé le stade de purification matérielle et spirituelle annoncé par le prophète (cf. ibid. XXXVI, in extenso).
L’impératif de l’heure est donc de réapprendre notre identité authentique, notre grandeur et notre destination universaliste pour dévoiler à nous et au monde la splendeur, l’éclat et la majesté de notre nation.
Dans l’attente de la Délivrance pleine et entière.
RAV SHLOMO AVINER
MON UNIVERS N’A PAS ETE DETRUIT
Expulsée de Goush Katif, j’ai su cependant préserver mon univers.
Là-bas, nous vivions aisément. Travaillant, mon mari et moi, nous avons pu acheter une petite maison, mettre un peu d’argent de côté, éduquer nos enfants comme nous le souhaitions sans dépendre de personne.
Mais depuis quelques mois nous sommes sans travail et avons épuisé nos maigres économies, pour manger, nous devons faire appel à la charité publique, quelle honte ! Nous avons déjà changé cinq fois d’hôtels, deux petites pièces pour une grande famille, il y a toujours pire ! Cet hôtel, je l’ai pris en haine. Nous n’avons ni cuisine, ni téléphone, ni les autres conditions d’une vie normale.
Quant au gouvernement, on croirait qu’il cherche à nous assassiner par ses tracasseries bureaucratiques de toutes sortes. Pour recevoir nos droits –dédommagement et autres- nous devons fournir des documents invraisemblables qui frisent la démence ou plutôt la malveillance. Chercherait-on vraiment à nous assassiner ?!
L’enregistrement des informations s’est fait en dépit du bon sens. On nous a volé des biens parfois irremplaçables, on nous a fait mille promesses qui n’ont jamais été tenues. En revanche, lorsque nous devons payer, tout marche comme sur des roulettes : emprunts, dettes bancaires, assurance –sur des biens que nous ne possédons plus- etc. Sur ce sujet, il y aurait beaucoup à dire.
Constamment, l’autorité dite responsable de l’expulsion voit en nous des menteurs professionnels. Avec les réseaux d’ordinateurs, les problèmes devraient se résoudre instantanément. Mais, c’est évident, on veut à tout prix nous briser.
A cette fin, ils ont mis aussi les médias au service de la diffamation à outrance et cherchent à créer l’illusion que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Jusqu’où pousser le mensonge ?! On nous bâillonne. N’ayons surtout pas le malheur d’ouvrir la bouche, nous serions alors qualifiés des pires superlatifs. On nous demande d’excuser et d’oublier ! Le mépris de la personne ne connaît plus de bornes.
Pourtant, je ne les hais pas, je suis incapable de ce sentiment. Je puis garder le moral même dans l’adversité et voir la moitié pleine de la bouteille. Il reste encore des gens convenables sur terre, généreux et désintéressés qui oeuvrent sincèrement à nous aider dans tous les domaines possibles, je les en remercie du fond du cœur.
L’Etat, je l’aime encore malgré le mal qu’il me fait et la guerre d’usure qu’il me livre. On n’est pas encore sorti de l’exil et, encore moins, de l’exil de l’esprit. Pourtant, je vais de l’avant, sachant que tout n’est qu’épreuves (« Sentier de Rectitude »), bien qu’il ne soit pas facile de vivre sans cesse dans l’incertitude et de voir son univers se modifier à chaque instant (Rav Kook, « Maamaré Haréiya », 161).
Le sentiment d’exil et d’aliénation, le roi David l’a expérimenté lui aussi (Ps. IXC, 9), n’ayant pas été considéré comme fils et frère à part entière. Pourtant, il a su puiser dans son trésor intérieur la force de ne pas abdiquer, ce dont je m’inspire aussi. La famille a été préservée dans son unité et chacun d’entre nous exprime librement sa spécificité dans le respect des différences, unie, cependant, dans une même conception du monde. Assurément, fidèles à l’esprit talmudique, mes enfants aiment les controverses, et leurs qualités nous font largement oublier les défauts dont ils nous accusent. D’ailleurs, si je ne les laissais pas s’exprimer, ils finiraient bien vite par se taire et ce serait dommage. Etre leur psychologue ne m’intéresse pas, je préfère rester leur mère. Quant à mon bébé, je réponds à l’amour et l’affection aux volontés qu’il ne peut pas encore exprimer.
Assurément –et pourquoi le taire- j’appréhende l’avenir et ses incertitudes, mais je m’efforce de minimiser cette pensée. Quoi qu’il en soit, nous resterons toujours une famille unie et je serai toujours disponible. Dans notre univers, beaucoup de choses se sont brisées mais ma personnalité a été épargnée. Pourvu, seulement, que Dieu ne m’abandonne pas !
Shiur Video
Rabbi Feuillet hebdomadaire
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