Shiur Video

Rabbi Feuillet hebdomadaire
https://vimeo.com/NULL

F – « Paracha « Vayétsé »

N° 642 « Paracha « Vayétsé » –7 kislev 5768 – ב »ה

RAV SHLOMO AVINER
Directeur de la « Yéshiva » « Atéret Yéroushalaïm »

COMMENT AMELIORER SES QUALITES MORALES ?

(Traduit et adapté par Maïmon Retbi)

Historiquement, la réflexion sur l’amélioration des qualités morales se divise en deux périodes : avant et après la publication du « Sentier de Rectitude ». Cet ouvrage résume ceux qui l’ont précédé et fonde ceux qui le suivront.

L’une des personnalités les plus éminentes de l’humanité, cabaliste et animé du « roua’h hakodesh » (« souffle de la sainteté », dimension mystique orientée vers la prophétie), Rabbi Moshé ‘Haïm Luzzato fut aussi un envoyé de Dieu chargé d’enseigner l’art d’améliorer les qualités morales.

Le « Gaon de Vilna », par exemple, chérissait ce livre « Tosfot Ma’assé Rav » qu’il ne reçut qu’après la mort de son auteur. « Une grande lumière, disait-il de ce livre, est sortie de lui pour éclairer le monde ». Le « Gaon » l’acheta à prix d’or, l’apprit par cœur et le répéta cent-une fois. Si Rabbi ‘Haïm Luzzato avait été vivant, avouait-il, il aurait voyagé à pied pour apprendre de lui la morale et l’art d’améliorer les bonnes qualités (cf. ibid.).

Ce livre, extraordinaire, petit de taille mais d’une profondeur insondable, contient plusieurs principes de base concernant l’amélioration des qualités.

Le premier – On ne peut pas sauter les étapes. On ne change pas sa nature en un jour mais uniquement ses actes, fait, en soi, louable puisque, par-là, on maîtrise son mauvais penchant. Répétons-le, il en est tout autrement de la personnalité. On doit s’armer de patience, travailler inlassablement sur soi et s’élever très progressivement. Se fondant sur des enseignements de nos Sages, le grand moraliste a édifié un système fondé sur dix nivaux successifs.

Le deuxième – Tout Juif peut s’élever très haut ; chacun doit s’efforcer d’être un « juste » (« tsadik »), entendu, par-là, faire son devoir. Mais c’est le « zélé » « ‘hassid » qui « contente l’Eternel », c’est-à-dire celui qui aspire intensément à Le servir. Mais on peut s’élever plus haut encore et accéder au « roua’h hakodesh » car chaque niveau dévoile la manière d’atteindre celui qui lui est supérieur.

Le troisième – Prendre garde de ne pas tomber, quel que soit son niveau, l’homme n’étant qu’un simple mortel. On apprend l’existence de ce risque d’Adam au « Jardin d’Eden », à la fois matière esprit qui, pourtant, a chuté. Constamment, on doit donc être vigilant.

Le quatrième – Suivant le grand Maître, l’esprit (dans le sens « d’intellect ») est l’instrument de l’amélioration des qualités morales. Il ne s’oppose pas à l’émotivité, à l’imagination ni aux autres forces spirituelles, mais c’est lui l’important. Il remplit une double fonction.

a) Celle de dévoiler le bien et le mal.

b) Celle de scruter convenablement l’état présent de la personne, ce qu’elle doit ou ne doit pas corriger. Le grand moraliste prescrivait de nombreuses autres règles mais nous ne nous étendrons que sur celle qui traverse en filigrane le « Sentier de Rectitude sous des formes d’expressions diversifiées, « Considère… », « Vois… »Regarde… » etc.

De nombreux « ennemis » cherchent à empêcher l’esprit d’accomplir sa tâche, le pire étant l’imagination. Alors que celui-là aspire inlassablement à atteindre la vérité, celle-ci, au contraire, n’en fait aucun cas. Assurément, il peut être source d’erreurs mais, constamment, il se contrôle car, répétons-le, il a pour but la connaissance du vrai. L’imagination, au contraire, perçoit le réel comme on le souhaiterait (et non pas tel qu’il est). C’est pourquoi on l’aime tant et on croit à tant de superstitions de subterfuges et de stupidités, nuisibles. Dans les conflits interpersonnels, par exemple, l’esprit est enclin à attribuer la responsabilité de telle situation au « je » tandis que l’imagination l’attribue à « l’autre ». Ainsi, on comprend pourquoi celle-ci est bien plus séduisante que celui-là, d’autant qu’elle cache systématiquement les défauts. Assurément, « l’imagination créatrice » est une valeur qui fait progresser l’humanité, elle n’est pas l’objet de notre présent propos.

Maïmonide l’a violemment combattue pour les raisons ci-dessus mentionnées. Ceux qui l’exaltaient, comme les adeptes d’une secte qui estimaient que l’imaginaire, quel qu’il soit, est un réel en potentiel, sinon, soutenaient-ils, pourquoi Dieu aurait-Il créé cette faculté intellectuelle ?

Hélas, ce combat est toujours d’actualité ; à preuve, le phénomène dit de la « défaite de l’esprit ». Il s’est considérablement développé ; pourtant, il a déçu parce qu’il ne donne pas de solutions instantanées mais à long terme (cf. « Orot », Israël out’hiyato »). Si par exemple, si on constate que la médecine moderne ne peut pas guérir untel, on s’adressera à la médecine magique, en oubliant que celle-là a guéri des centaines de millions de malades. On doit également déplorer que dans le domaine politique aussi on rêve à des solutions-miracles qui, en réalité, ne font qu’aggraver la situation.

L’amélioration des qualités morales dépend de la victoire de l’esprit sur l’imagination et sur la double prise de conscience : qu’entends-je par bien authentique et où me situé-je par rapport à lui ? Inlassablement, l’esprit reprend le combat contre l’imagination et l’emporte grâce au « vidouï » (la reconnaissance et l’aveu à Dieu de ses fautes), force sublime de dire : « Je suis coupable », prélude à toutes les formes de salut. Si je me reconnais coupable d’avoir détruit, c’est donc que je peux construire.

C’est l’acte existentiel du « vidouï » qui procure la joie et la force de s’élever sans cesses davantage, de corriger ses défauts et de « contenter Son Créateur ».