Shiur Video

Rabbi Feuillet hebdomadaire
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F – « Ki Tissa »

N° 606 « Ki Tissa » – 20 adar 5767 – ב »ה

RAV DOV BIGON

CECI ETANT

Un « dire » de la Thora

(Traduit et adapté par Maïmon Retbi)

Celui qui réfléchit et qui reste fidèle à ses positions, celui-là doit sans cesse parfaire son monde intérieur, les différents domaines qui le composent et chaque point de détail. Cette tâche n’a pas de fin, chaque jour on est appelé à tirer de nouvelles leçons des progrès en matière de morale et de sciences.
(« Orot Haqodech » III, 120).

« QUI RAPPROCHERA ISRAEL ? »

Après avoir reçu les Deuxièmes Tables de l’Alliance à « Kippour », Moïse s’est éloigné du « camp d’Israël » jusqu’à l’édification du Tabernacle, au premier nissan. « Moïse prit sa tente et la dressa en dehors du camp, à distance. Il la nomma « Tente d’Assignation ». Celui qui désirait consulter l’Eternel s’y rendait, à l’extérieur du camp » (Ex. XXXIII, 3). En revanche, Dieu parla « face à face » avec Moïse et le convainquit de retourner dans le camp. L’Eternel parla à Moïse face à face, comme on parle à un ami ; ensuite, [Moïse] retourna au camp (ibid. ibid. 11). Nos Sages ont rapporté l’objet de leur entretien. « Maintenant, le Rav (l’Eternel) et le disciple (Moïse) sont en colère. Qu’adviendra-t-il d’Israël ?! » (Traité « Bérakhot », 63 b), sous-entendu, explique Rachi, « Qui les (Israël) rapprochera (puisque actuellement le peuple est laissé à lui-même) ? » Moïse dresse donc à nouveau sa tente à l’intérieur du camp. Désormais, il dirige à nouveau le peuple sur place et non plus à distance. Ce faisant, il peut s’employer plus facilement à le rapprocher de Son Père Céleste.

Ceci étant – Ainsi, Moïse s’est réinstallé « à l’intérieur du camp d’Israël », rapprochant notre peuple de l’Eternel et vivifiant l’esprit de celui-ci malgré les crises qu’il traversait. De même, à notre génération, nous devons réinstaurer la Thora en ramenant à l’intérieur du camp d’Israël ceux qui étudient et enseignent la Thora, patrimoine de notre peuple tout entier. « Moïse nous a prescrit la Torah, héritage éternel pour la communauté de Jacob » (Deut. XXXIII, 4) car « elle est ton seul moyen de survie et de longévité » (Deut. XXX, 20).

En s’y éloignant, nous avons engendré une crise d’identité et une dégradation éthique et spirituelle. Pour y remédier, nous devons répandre à nouveau la Thora au sein du peuple en attelant à cette tâche les sages et les rabbins les plus éminents, en donnant à nos enfants une éducation juive et en leur enseignant la Thora, dans un esprit de consensus, d’amour et de foi.

Dans l’attente de la Délivrance pleine et entière.



RAV SHLOMO AVINER

A CHAQUE JOUR SUFFIT SA PEINE

Question – Très souvent, je sombre dans le désespoir. Sincèrement, j’essaie d’améliorer mes qualités morales et mes actes mais je n’y parviens pas. Lorsque je me regarde en face, je perds toute contenance. Réellement, suis-je sincère envers moi-même ? Mon image de marque correspond-elle à la réalité ? Si souvent je me suis repris pour retomber aussitôt ! Aujourd’hui, ça va bien mais j’appréhende de rechuter ! Dès lors, pourquoi ferais-je aujourd’hui des efforts ?

Réponse – Vous avez répondu à votre question, « aujourd’hui ». L’Eternel ne vous demande pas de tout « réparer » d’un seul coup, « A chaque jour suffit sa peine », « Si seulement aujourd’hui encore vous écoutiez Sa voix « ! (Ps. XCV, 7) On ne guérit pas un drogué en lui demandant de tout arrêter du jour au lendemain, mais peu à peu, et, périodiquement, on observe les progrès.

Nos Sages ont enseigné : « Fais « téchouva » (reviens vers Dieu et vers toi) un jour avant ta mort » (Maximes des Pères » 2, §10). – « Ce jour, le connaît-on », lui objectèrent ses disciples ? – « C’est justement parce qu’on ne le connaît pas qu’on doit se repentir dès aujourd’hui », leur rétorqua-t-il. Pourquoi, interroge le Rav Kook, ne pas dire plus simplement : « Repens-toi tous les jours » ? » Et le grand Maître d’expliquer qu’il existe une différence de principe entre les deux propositions. « Se repentir tous les jours » implique de planifier son existence, tâche insupportable, surtout si on pense qu’on vivra longtemps et que, constamment, on devra veiller soigneusement à ne pas retomber, d’autant plus qu’on ne sait pas à quelles épreuves on sera confronté. C’est pourquoi on prône la méthode inverse, traiter ponctuellement les problèmes jour après jour, répartissant ainsi le fardeau dans le temps, peu à peu, de sorte qu’on finit par corriger ses travers (« Midbar Shour », 88-89).

Essentiellement, on doit se concentrer sur tel point précis et non pas se disperser sur plusieurs (cf. « Moussar Avikha » 2, §2, « Békhol Dérakhékha Daéou »). Toute sa vie, peut-être, on ne devra « réparer » qu’un nombre limité d’imperfections par un constant combat sur soi. D’ailleurs, au niveau collectif, nous luttons toujours contre les mêmes ennemis.

Le mythe de Sisyphe est une transposition grecque de ce Juif qui passait son temps à étudier la Thora et à l’oublier. Souvent, enseignent nos Sages, « C’est par la peine qu’on s’est donnée qu’on mérite la récompense » (passim), et non par l’objet de l’effort. Dieu ne juge pas la personne sur les résultats mais sur les efforts, chacun ayant ses données propres. « Qu’on fasse beaucoup ou peu, pourvu qu’on dirige son cœur vers le Ciel » (Traité « Bérakhot », 17 a).

Après des années d’efforts sur soi, constate le Rav Kook, on s’aperçoit parfois qu’on n’a pas bougé, comme si on avait agi en vain. En réalité, explique-t-il, la « réparation », c’est dans l’effort qu’elle réside et non pas dans les résultats car « les Sages n’ont jamais de repos » (idée reprise du Traité « Bérakhot » fin). De plus, explique encore le grand Maître, Dieu n’assigne pas à la personne une tâchée déterminée et limitée qu’il faudrait remplir durant toute sa vie mais un constant dépassement de soi. Le sentiment de désespoir a pour origine le fait qu’on ne cherche pas vraiment à se dépasser, l’Eternel (répétons-le), récompensant l’effort, ce qu’on ressent intrinsèquement.

A l’appui de son explication, le Rav Kook cite un verset des Psaumes : « Heureux l’homme qui craint l’Eternel, qui prend grand plaisir à Ses commandements » (Ps. CXII, 1) – « A Ses commandements », comme tels, et non pas à la récompense qu’il recevra pour les avoir pratiqués. Si on accepte avec sérénité de passer par les ténèbres, on resplendira d’une Lumière renouvelée. « L’Eternel est ma Lumière et mon Salut, de qui aurais-je peur ? » (ibid. XXVII, 1) (d’après « Chémoné Qévatsim » 8, §36).