Shiur Video

Rabbi Feuillet hebdomadaire
https://vimeo.com/NULL

F – Rosh Hashana

 

N° 583 « Rosh Hashana » – 1 tichri 5766 – בס« ט


RAV SHLOMO AVINER


GUERRE ET REPARATION INDIVIDUELLE


Depuis quelques dizaines d’années, nous sommes entrés dans une nouvelle période. Désormais, nous disposons d’une armée qui porte bien son nom, de « Défense d’Israël », défensive, par nature, et non pas « offensive » ; ainsi, éminemment morale.


Einstein disait : « Le niveau de moralité d’un peuple s’estime d’après le comportement de celui-ci en temps de guerre » ; « le nôtre (en Allemagne) est bas », ajoutait-il. Du nôtre, je dirais qu’il est beaucoup trop haut. En manière de boutade, un humoriste israélien se plaisait à dire qu’au Concours de Morale, « Miss Israël » était toujours la dernière. Mais il s’empressait d’ajouter qu’elle était la seule à prendre part à la compétition !


Nos Sages enseignent que « les guerres sont des stades de la Délivrance » (Traité « Sanhédrin » 97 a), « celles d’Israël contre les nations », explique Rachi. C’est dans ce contexte que figure l’expression célèbre « début de la Délivrance », « les guerres font aussi partie du début de la Délivrance » (Traité « Méguila » 17 b) car, par le pouvoir de les faire, on échappe aux pogromes qui étaient notre lot à l’époque précédente.


Maïmonide donne un titre significatif à l’un des Livres du « Yad Ha’hazaka » (ouvrage monumental qui classe les lois rabbiniques établies) : « Lois Relatives aux Rois et aux Guerres. » Il définissait ainsi la mission de ce dernier : à priori, on ne nomme un roi que afin qu’il rende la justice et qu’il fasse la guerre, comme il est dit : « Notre roi nous jugera, marchera à notre tête et combattra avec nous » (« Hilkhot Mélakhim 4, 10, sur Sam. I VIII, 20). Dans cet esprit, la première tâche du Messie (Roi « oint » d’Israël)) sera de « faire les guerres de l’Eternel » (ibid. XI, 4) ; et, la dernière (relativement à notre présent propos), de « remporter la victoire sur les nations qui l’entourent » (ibid.), puisque c’est lui qui devra la diriger (sur les guerres du Messie, cf. également Isaïe LXIII).


Tant que la célèbre prophétie sur la « Paix Universelle » ne s’est pas encore concrétisée, aucun peuple ne peut vivre sur sa terre sans armée. C’est pourquoi la nôtre émane directement du peuple et qu’elle n’est pas faite de volontaires ou de salariés (cf. Nom. I, 3).


Nos ancêtres étaient des guerriers ; Abraham, par exemple, contre les « quatre rois » (Gen. XIV) ; Jacob (ibid. XXII) ; Josué, par excellence, qui a reçu la Thora de Moïse (Maximes des Pères 1, §1), et qui a dirigé la guerre contre Amalek (l’ennemi juré d’Israël) et la conquête d’Eretz Israël.


Le Rav Kook écrivait : « Nous considérons les premières générations, celles dont parle la Bible… les générations qui étaient occupées à faire la guerre… éminentes personnalités, (nous les considérons) avec amitié, crainte et tremblement… » « A l’époque, la guerre était on ne peut plus nécessaire… d’elle dépendait notre existence » (« Orot », « Hamil’hama » 2).


Sous prétexte que nous débattons de problèmes qui ont trait à la collectivité israélienne, ne nous imaginons pas pour autant que nous délaissons la « réparation de l’individu », ce qui s’opposerait à la méthode d’approche de notre Maître ; on pourrait la synthétiser ainsi : « Le général et le particulier », ou, plus exactement, « le particulier comme émanant du général ».


L’intégrité au niveau individuel est le fondement de la victoire, comme l’expliquait Rabbi Moshé ‘Haïm Luzzato à propos du roi David qui « allait combattre avec une confiance en soi absolue. » « Je poursuis mes ennemis, je les atteins ; point de relâches que je ne les ai détruits » (Ps. XVIII, 38) « car « il nettoyait complètement » (toutes ses fautes) (« Sentier de Rectitude » 10). Par-là, nous n’entendons pas celles qu’on considère comme infraction à la Thora, mais celles qu’on foule au pied en s’imaginant avoir agi de manière licite, au sens où nos Sages enseignaient : « Pour la majorité des gens, le vol ; pour une minorité, les interdits sexuels ; et, pour tous, la médisance à peine esquissée » (Traité « Baba Batra » 165 a). Il ne s’agit pas du vol à proprement parler, explique le grand moraliste, mais d’un bas niveau de moralité en affaires, considérant comme permis les bénéfices qui portent préjudice à autrui ; ni, non plus, d’infractions aux interdits sexuels, au sens propre, mais d’un manque de pudeur dans la manière de regarder, de parler, d’écouter et de penser. Quant à la « médisance », on ne sait que trop combien cette plaie est répandue (d’après ibid. 11).


En réalité, tout repose sur la foi en l’Eternel et les bonnes qualités morales. C’est pourquoi on doit pratiquer avec joie le commandement de l’Etat et celui de l’Armée, ne pas –pour ainsi dire- reprocher à Dieu de diriger l’histoire suivant une conception et un plan qui nous échappent, ni se montrer enfant gâté.


Nous devons affronter les nombreux problèmes qui nous attendent en personnes libérées, et savoir gré à l’Eternel de la Bonté et de la Générosité qu’Il témoigne à notre égard (inspiré Ps. passim).