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Rabbi Feuillet hebdomadaire
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F – Paracha « Pine’has »

F – N° 624 – Paracha « Pine’has » – 21 tamouz 5767 – ב »ה

RAV SHLOMO AVINER

N’AVONS-NOUS PAS DEPASSE LES LIMITES ?

(Traduit et adapté par Maïmon Retbi)

Question – Moi aussi, je prône les valeurs de l’amour et de la foi envers notre peuple, mais n’avons-nous pas dépassé les limites ? Ne devrions-nous pas avoir le courage et la vaillance de faire entendre la voix de la Thora dans son authenticité et dire tout haut : « Cet homme est corrompu, il n’est pas des nôtres, « Sa résidence sera hors du camp (Lev. XIII, 46) ! » ?

Réponse – Assurément, mais le problème ne date pas d’hier, Moïse y était déjà confronté lorsqu’il dirigeait le peuple : « Ordonne aux Israélites de renvoyer du camp tout individu lépreux, atteint de flux, ou souillé par un mort » (Nom. V, 2). Et Rachi d’expliquer, en s’appuyant sur un enseignement de nos Sages, qu’on doit distinguer entre ceux qui doivent être renvoyés d’un camp, de deux ou des trois.

Suivant cette méthode d’approche, l’Admor de Ezvitza explique qu’il s’agit de trois catégories d’individus qui ont chacun son manque particulier.

1. Celui qui est atteint de flux – Il doit être mis à l’extérieur du « camp de l’Immanence Divine » et du « camp des Lévites » affectés au Culte Divin, mais pas du « camp d’Israël ». Esclave de ses passions, il reçoit le terrible châtiment de ne pas servir l’Eternel, mais il reste encore à l’intérieur du « camp d’Israël ».

2. Celui qui a été souillé par l’impureté d’un mort – Triste par suite d’un décès, il ne peut pas demeurer dans le « camp de l’Immanence » car, comme on le sait, ne peut y appartenir que celui qui est dans la joie. Cependant, il peut rester dans le « celui des Lévites » et servir l’Eternel. On peut être triste, amer et déprimé tout en se vouant corps et âme au Culte de l’Eternel. Malgré tout, on ne sera pas admis à rester dans le « camp de l’Immanence » qui requiert « force et joie » (Chr. I, XVI 27).

3. Le « métsora » (improprement traduit par « lépreux ». Il souffrait d’une maladie de peau due à la médisance qui n’existait qu’à l’époque du Premier Temple) – C’est le pire de tous. Comme il médit d’autrui, il se voit retranché des trois camps, comme il est dit : « Il demeurera isolé et sa résidence sera hors du camp » Lev. XIII, 46), illustrons :

En 5608 (1849), une épidémie de choléra se déclara en Russie. Les Juifs se mirent à faire leur examen de conscience (puisque rien n’est fortuit). L’un d’eux vint trouver Rabbi Israël Saleanter pour dire du mal d’untel. Le grand Maître lui répondit qu’on ne bannit pas du camp le « métsora » parce qu’il avait menti, mais même s’il avait dit la vérité (d’après traité « ‘arakhin » 16). Puisqu’il s’entend si bien à débusquer les fautes chez les autres, il sera retranché du camp. « Isolé », il pourra faire son introspection à loisir pour « réparer » ses défauts et ses fautes. De là, on voit que « tel est pris qui croyait prendre. » En disant d’autrui qu’il appartient au « ‘érev rav » (péjoratif ; descendant des Egyptiens qui s’étaient joints à notre peuple lors de la sortie d’Egypte, plus ou moins authentiquement convertis) il ne faisait que se projeter, comme l’enseignait le « Gaon de Vilna ». « Ceux qui cherchent querelles et médisent d’autrui… -ces derniers étant les pires- portent le nom « d’Amalécites » (ennemis jurés d’Israël ; « Even Shéléma » 11, §8). Que Dieu nous épargne de tomber dans leurs filets.

On ne rappellera jamais assez la gravité de la médisance. A propos de la « Faute des Explorateurs » (cf. Nom. XIII), une « Mishna » enseigne : « Ainsi, la parole est plus grave que l’acte car Dieu n’a décrété le châtiment de nos ancêtres dans le désert que lorsqu’ils ont bafoué (Eretz Israël) » (Traité « ‘arakhin » 15 a). Celui qui décrie une jeune fiancée commet une faute plus grave que s’il l’avait violée » (ibidem), malgré tout ce que cet acte a d’horrible et de traumatisant, car même si on découvre qu’il avait menti, il y aura toujours des gens pour penser « qu’il n’y a pas de fumée sans feu ».

Là encore, on doit apprendre de la démarche intellectuelle du plus achevé de tous les hommes : « Lorsque Dieu dit à Moïse (après la « Faute du Veau d’Or ») : « Descends, car le peuple que tu as fait sortir d’Egypte s’est corrompu » (Ex. XXXII, 7), il (Moïse) –qui tenait les Tables (de l’Alliance)- ne voulait pas croire qu’Israël avait (effectivement) fauté. Il Lui dit : « Je n’y croirai pas tant que je ne l’aurai pas vu », comme il est dit : « Alors qu’il approchait du camp, il vit le veau (d’or) et les danses. Moïse s’emporta et jeta les Tables de ses mains, les brisant au pied de la montagne » (Ex XXXII, 19). Il ne les brisa qu’après les avoir vues de ses yeux. Malheur à celui qui témoigne sur la foi de ce qu’il voit uniquement. Moïse aurait-il pu douter de la déclaration de l’Eternel, « Le peuple… s’est corrompu ?! » – Non. Mais il voulait enseigner le savoir-vivre (authentique) à Israël. Même si on entend telle chose d’une personne digne de confiance, on n’est pas tenu de recevoir son témoignage ni (à plus forte raison) de se comporter en conséquence » (« Shémot Rabba » 46, §41).