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Rabbi Feuillet hebdomadaire
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F – Paracha « Vayé’hi »

N° 547 Paracha « Vayé’hi », 14 tévet 5766 – ב »ה –

RAV DOV BIGON

CECI ETANT

« DIEU VOUS RAMENERA AU PAYS DE VOS ANCETRES »


Sur le point de mourir, Jacob bénit les deux fils de Yossef, donnant la préséance à Éphraïm (cadet) sur Ménaché (aîné), contre la volonté de Yossef : « Ce n’est pas ainsi qu’il faut faire, mon Père », dit Joseph. « C’est l’autre qui est l’aîné. Mets la main droite sur sa tête. ». Son père refusa et dit : « Je sais, mon fils, je sais. [Le plus âgé] deviendra aussi un peuple. Il atteindra aussi la grandeur. Mais son jeune frère sera encore plus grand et ses descendants deviendront des peuples à part entière. » (Gen. XLVIII, 18-19).

Rachi explique ainsi le comportement surprenant du grand Patriarche : c’est d’Ephraïm que descend Josué à qui Dieu devait confier la tâche d’installer notre peuple en Eretz Israël, d’enseigner la Thora et de vulgariser la foi dans le monde en disant : « Soleil, arrête-toi sur Guivôn ; lune, fais halte sur la vallée d’Aiyalôn » (Jos. X, 12). C’est de Ménaché que descend Guidôn, pour qui Dieu fait aussi un miracle, mais il ne s’attelait pas aux deux grandes tâches qu’avait assumées Josué.

Ceci étant – On établit souvent un parallélisme entre la diaspora en Egypte, l’itinéraire de quarante ans dans le désert et la possession d’Eretz Israël sous Josué, et les deux mille ans d’exil, le retour des dispersés, notre renaissance nationale en Israël, et les miracles que Dieu fait pour nous, jadis et maintenant, cachés ou dévoilés, visibles par le monde entier. L’humanité pressent que tout ce qui se passe en Israël a une portée universelle, « qu’Israël est le coeur des nations » (Kouzari, « Maamar 2), et que tout ce qui le touche a des incidences sur le reste du corps.

Assurément, la création de l’État dans sa dimension matérielle concerne l’ensemble de l’humanité, mais l’étude de la Thora –en Eretz Israël, en particulier- est tout aussi influente, comme l’illustre, entre autres, l’enseignement suivant : « Ce fut soir, ce fut matin, le sixième jour » (ibid. I, 31) – « (De l’ajout de l’article défini) « le », on apprend que l’Eternel a soumis « l’Acte du Commencement (le droit de la création d’exister) à la clause suivante : « Si Israël accepte la Thora, tant mieux (le créé continuera d’exister) ; sinon, Je le renvoie (le créé) à l’état de chaos ». (« Midrach », passim).

Actuellement, nous reprenons pied avec notre Terre et avec la Thora, et vivons au niveau collectif la promesse faite par Jacob à sa famille : « Dieu sera avec vous, et vous ramènera au pays de vos ancêtres » (Gen. XlVIII, 21).

Dans l’attente de la Délivrance pleine et entière.






RAV SHLOMO AVINER

« SI JE T’OUBLIE, JERUSALEM »


A chaque génération, nous rappelons inlassablement notre serment : « Si je t’oublie, Jérusalem, que ma (main) droite m’oublie. Que ma langue s’attache à mon palais si je ne me souviens toujours de Toi, si je ne place Jérusalem au sommet de toutes mes joies » (Ps. CXXXVI, 5-6), toile de fond de notre sensibilité et raison d’être de notre existence dans les affres de la diaspora, car nous savions que « l’an prochain à Jérusalem ».

Le temps des actes est arrivé. Grâce à Dieu, nous sommes revenus à Jérusalem, dans sa totalité. A présent, il faut repeupler la vieille ville et lui insuffler à nouveau le Judaïsme. Cependant, on ne saurait lui donner un statut privilégié, comme si, à Dieu ne plaise, contrairement à d’autres régions d’Israël, elle faisait partie du consensus national et divin.

Un jour, des disciples dirent au Rav Tzvi Yéhouda qu’on parlait de livrer la vieille ville à un pays étranger. Et le grand Maître de répondre : « Et le Golan ? » Pensant qu’il n’avait pas compris, ils posèrent à nouveau leur question, recevant la même réponse et ce, à trois reprises, ce qui les déçut.

En réalité, le Rav avait une conception globale d’Eretz Israël, au sens où, fidèle à sa méthode d’approche, il expliquait ainsi la « Michna » : (« L’emplacement déterminé par) l’intérieur des murailles (de Jérusalem) a une sainteté plus grande qu’elles (que les autres villes entourées de murailles) (« Kélim » 6, 7-8) : « L’intérieur des murailles (de Jérusalem) a une sainteté qui a pour origine les autres villes (entourées de murailles) », car le mot « méhen » peut se lire « qu’elles » (idée de comparaison) ou « d’elles » (idée d’origine). En d’autres termes, l’édification de la vieille ville a pour origine –passe par- l’édification d’Eretz Israël.

Dans le même esprit, nos Sages enseignent que l’alliance qu’avait contractée Abraham avec Avimelekh, alors roi de Jérusalem (de ne pas porter préjudice à ses habitants ni à leurs descendants), fut un obstacle à la conquête de la ville par David. De même, enseignent-ils encore, capituler devant les habitants du « Goush Katif » de jadis portait préjudice à la ville sainte (cf. Rachi et Ralbag sur Sam. II V, 6-9 ; « Pirké de Rabbi Eliézer, 36). Déjà à l’époque, la libération de Jérusalem n’était pas chose facile.

Une question est d’autant plus difficile à résoudre qu’elle est importante. Malgré tous nos efforts, nous n’avons pas pu libérer Jérusalem à la Guerre d’Indépendance. Maintenant, c’est chose faite mais en aucun cas nous ne saurions tolérer que les étrangers qui l’habitent continuent à faire obstacle à son repeuplement.

Depuis longtemps le gouvernement aurait pu mener cette tâche à bien si nous en avions eu le mérite. Assurément, elle relève du collectif, mais aussi du simple particulier.

Lorsqu’on objectait au Rav Tzvi Yéhouda que le passage « Na’hem » (dit à la « Amida » du neuf av, sur l’état de désolation où est plongée la ville sainte), il rétorquait, reprenant ces mêmes Sources, que la vieille ville était toujours « tenue dans un état d’abaissement et de désolation et que personne n’y habite ». Effectivement, il y a de quoi pleurer lorsqu’on voit les synagogues en ruines et les autres vestiges de sa gloire passée. Le grand Maître connaissait bien la vieille ville. Il s’illuminait lorsqu’il entendait dire qu’on la repeuplait.

Dans sa jeunesse, il étudiait à la « yéshiva » (académie religieuse) « Thorat ‘Haïm », actuellement « Atéret Yéroushalaïm ». A la Guerre d’Indépendance, la vieille ville tomba aux mains de l’ennemi qui la pilla et profana toutes les synagogues et lieux d’étude qui s’y trouvaient, à l’exception de cette « yéshiva ». Un « Juste des Nations » –qui habitait en bas- la protégea durant vingt ans et, à notre retour, il remit les clefs au gouverneur de la ville, à l’époque ‘Haïm Herzog, plus tard président de l’état. Lorsqu’on lui demandait « : « Comment avait-il pu protéger cet endroit durant si longtemps, il répondait : « Ce n’est pas moi qui l’ai protégé mais l’inverse ».

Grâce à Dieu, « la Thora revient chez son propriétaire » (passim), fait entendre à nouveau sa voix et hommes et femmes âgés, petits garçons et petites filles se promènent encore sous protection- dans les rues de Jérusalem (inspiré de Zac. VIII, 4).

Lors du partage d’Eretz Israël entre les différentes tribus, Jérusalem est resté le patrimoine de toutes (Traité « Méguila », 26 a) car c’est à elles qu’elle doit son existence (« Midrach Téhilim », 122), « ville par laquelle tous se trouvent unis en une même unité » (Ps. CXXII, 3 ; lecture possible dictée par le contexte), qui rend tout Israël uni dans un même sentiment d’amitié (Talmud de Jérusalem, « ‘Haguiga 3, 6). La ville appartient à tous les Juifs, par-delà les clivages, les options personnelles et le lieu où ils habitent, tous coopèrent à son édification, cœur du monde et « cœur d’Israël » (« Tikounjé Zohar, 21 ; « Béouré Hagra », 56).

(Traduit et adapté par Maïmon Retbi, spécialisé dans les sujets kodech, hébreu/français)