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Rabbi Feuillet hebdomadaire
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F Paracha « Matot »

N° 523 – Paracha « Matot » – 23 tamouz 5765 ב »ה

RAV DOV BIGON

CECI ETANT

UNE PERIODE PROPICE AUX BILANS ET AU REPENTIR

La période qui sépare le jeûne du 17 tamouz de celui du 9 av s’appelle « ben Hametsarim » (« entre les deux Malheurs »). L’usage est de restreindre les occasions de réjouissances à cause des catastrophes qui s’y sont passées.

Le 17 tamouz, les Tables de l’Alliance ont été brisées par suite de la Faute du Veau d’or ; au premier Temple, le sacrifice perpétuel s’est interrompu ; au deuxième, la première brèche a été faite aux remparts de Jérusalem ; le perfide Apostémos a brûlé un « séfer Thora » et a introduit une idole dans le Temple. Au 9 av, le premier et le deuxième Temple ont été détruits ; Dieu a décrété que nos ancêtres, dans le désert, n’entreraient pas en Terre d’Israël ; les Romains ont pris la ville de Bétar en assasinant ses habitants par dizaines de milliers ; en ce jour prédisposé aux catastrophes, les Babyloniens ont labouré le Temple et le Mont qui porte son nom, mettant en pratique la prophétie : « Sion sera labourée comme un champ » (Jér. XXVI, 18).

Lors de ces tristes jours, « on doit éveiller son cœur au repentir et avoir constamment à l’esprit que nos mauvaises actions ont entraîné les mêmes malheurs que celles de nos ancêtres ; par-là, on améliore ses actions. C’est pourquoi, durant cette période, on doit veiller à scruter ses actes et à abandonner les mauvais » (« Abrégé du Choul’hane ‘Aroukh », 121, §1).

Ceci étant – En cette période, nous devons faire le bilan, au niveau national comme individuel, et « faire téchouva » (se repentir, revenir vers Dieu et vers soi) quant à notre relation au peuple, à la Thora et à la Terre d’Israël.

Notre relation au peuple – Nous devons réapprendre notre identité, notre grandeur, notre spécificité, « dynastie de prêtres et peuple saint » (Ex. XIX, 6) cosmopolite, éclairer les peuples et leur faire du bien ainsi que Dieu l’a assuré à notre ancêtre Abraham : « Je ferai de toi une grande nation… Toutes les familles de la terre seront bénies par toi » (Gen. XII, 2-3), tant il est vrai que « nous sommes un peuple infiniment plus grand que tous les autres. Lorsque nous en prenons conscience, nous connaissons notre être et, inversement, lorsque nous l’oublions. Un peuple qui a oublié ce qu’il est ne peut être que mesquin et vil… Oublier qui nous sommes c’est oublier notre grandeur » (Rav Kook, « Orot », 55).

Notre relation à la Thora – Les Maîtres de la Michna ont enseigné : « Chaque jour, une Voix céleste se fait entendre du Mont ‘Horev (lieu de la Révélation sinaïtique) et proclame : « Malheur à l’homme, car la Thora est bafouée » (Maxime des Pères VI, 2). Si on l’étudie en lui donnant toutes les marques d’honneur qui lui sont dû et qu’on soit animé de la Crainte de l’Eternel, alors on puise en elle toute la félicité (d’après « Orot Hatéchouva » 4, §9). On doit revenir vers elle, nous et nos enfants, et l’étudier puisque, comme son nom l’indique (« Thora » : Enseignement divin), elle est la Codification divine de la vie. Comme telle, elle redonnera un souffle nouveau à notre pays qui renaît à la vie.

Notre relation à Eretz Israël – On doit se débarrasser de la conception erronée qui voit dans Eretz Israël un moyen d’atteindre des objectifs vitaux, la sécurité, l’économie, par exemple, ou même spirituels et religieux car, pour citer en substance un enseignement du Rav Kook, Eretz Israël et notre nation sont un tout indissociablement lié, une unité transcendante et essentielle, de sorte qu’elle n’est pas négociable (« Orot », 9). En conséquence, on ne saurait en céder ne serait-ce qu’une partie, à l’instar de la vie qui n’est pas monnayable.

Les dirigeants actuels et une partie de la population doivent faire téchouva vis-à-vis d’elle (propos tenus par le Rav Tzvi Yéhouda et autres sommités). Le manque de spiritualité et de confiance en Dieu sont à l’origine d’un état d’abaissement sans précédent : vouloir chasser des Juifs de leur pays pour donner un nouvel état aux Arabes qui, de toutes leurs forces, aspirent à nous exterminer.

Par le « Retour » (à Dieu et à notre spécificité authentique) au niveau national et individuel, nous changerons en joie cette période de deuil. « le jeûne du quatrième mois et le jeûne du cinquième, le jeûne du septième et le jeûne du dixième mois seront changés pour la Maison de Juda en joie et en allégresse. Mais chérissez la vérité et la paix ! » (Zac. VIII, 19).

Dans l’attente de la Délivrance pleine et entière.

RAV SHLOMO AVINER

CES DERNIERS TEMPS, AIMER EST BIEN DIFFICILE

Je ne parlerai pas ici de ceux que j’aime spontanément, c’est chose facile, mais de ceux avec lesquels je ne suis pas d’accord, qui m’agacent et qui, selon moi, portent préjudice à la nation. Les aimer est un défi. Tout homme, même mauvais, a des aspects positifs qui justifient cet amour, tâche ô combien difficile mais passionnante, aimer son prochain comme soi-même (d’après Lev. XIX, 18), si prisée par l’Eternel !

Constamment, on m’énerve et je m’attriste ; cependant, je dois m’efforcer de les aimer quand même, ceux qui militent contre la « Séparation » et leurs sympathisants, en particulier. Depuis la création de l’Etat, je crois bien que ce sont eux qui me font le plus de mal. Pour moi, ces derniers temps, la Mitsva d’aimer son prochain est devenue bien difficile, mais ne pratique-t-on que celles qui nous plaisent ?! A l’égard de ma femme ou de mes enfants, la pratiquer va tellement de soi ! Il suffit que je les vois ou que je pense à eux pour me languir d’eux et éprouver de la sérénité. Quant aux autres que, pour employer un euphémisme, je n’aime pas particulièrement, j’essaie de leur trouver du crédit. Assurément, ils ne sont pas méchants, ils se sont égarés, ce qui ne dispense pas pour autant de lutter. Je ne les hais pas, à l’instar de ceux qui, à Dieu ne plaise, profanent le Shabbat.

Mais il y a pire, ceux qui me haïssent, m’insultent et s’enflamment contre moi. Parfois, je voudrais leur rendre la monnaie de leur pièce. Les pionniers, me disent-ils, sont comme les militants du « Hammas » (mouvement musulman terroriste extrémiste), que j’ai conduit le pays à l’abîme, que j’ai entraîné la mort du Chef de l’Etat et créé des scissions, qu’ils aiment les Palestiniens plus que moi, qu’ils ne me considèrent pas comme leur frère et que, tout compte fait, une guerre civile n’est qu’une guerre civile. L’amour, voudrais-je leur dire, doit être réciproque ; mais je me ressaisis en me disant que peut-être ils finiront par m’aimer aussi car, après tout, ce sont mes frères que j’aime coûte que coûte, et qui dit qu’ils ne changeront pas d’avis ? C’est frustrant, parfois, mais cela me sublime tellement !

Il y a pire encore, ceux qui cherchent à délégitimer la cause, c’est déjà de la méchanceté. Je suis violent, disent-ils. J’en rirais pour n’en pas pleurer ! Dans les manifestations, je vois mes amis se laisser tabasser pour ne pas être taxés de « violents » ou ne plus recevoir de coups. Assurément, je m’oppose à ce qu’on bloque la circulation, mais tel n’est pas ici mon propos. Je souffre de voir ces jeunes ainsi molestés ; c’est assez rare mais quand même terrible ! Et les médias ou, pire encore, les militaires, diront que je suis violent ! Cette fois, vous êtes arrivés à me mettre en colère. Peu importe, je saurai me dominer et continuerai à vous aimer même si vous m’avez offensé. Malgré tout, je vous en supplie, n’envoyez plus de provocateur, combien de fois devrais-je vous le dire ? En réalité, vous voulez jeter à la rue les habitants de Goush Katif ; c’est pourquoi vous cherchez préalablement à salir leur image de marque et celle de leurs sympathisants, on n’arrête pas de voir les provocateurs à l’œuvre, excusez mon franc parler. Vous décourageriez les meilleures volontés.

En réalité, les « violents », ce sont vous, les policiers, qui ne réagissez pas lorsque les conducteurs sortent de leur voiture un couteau à la main, ou autres formes de violence plus graves encore, surtout lorsqu’elle est dirigée contre ceux qui, aux carrefours, distribuent les petits rubans oranges. Et on ose parler d’équilibre et d’objectivité ?!

D’aucuns argueront qu’il s’agit de cas exceptionnels et qu’on ne peut pas généraliser, disons. En réalité, l’exception est devenue la règle car la violence est aussi verbale. Tout le monde s’accorde à dire que le Chef de l’Etat écrase sur son passage ceux qui partagent mes opinions ; mais vous qui le savez, pourquoi vous tenez-vous à l’écart ? Ce jeune homme qui bloque les routes – ce à quoi, je le répète, je m’oppose – est un idéaliste, un « amant d’Israël », un Juste, à sa manière, qui prend le risque d’échouer aux examens et de remettre en question la bonne marche de ses études et même son avenir personnel, pour son amour d’Israël. Et lorsqu’il rentre chez lui, il est réprimandé par ses parents, ses rabbins et, un peu, par moi aussi qui l’aime. Parfois, les coups qu’il encaisse des policiers font peur à voir, à en juger par ce que montrent la télévision et l’Internet, et ses blessures, physiques et mentales, peuvent être longues à se cicatriser. J’ai du mal à aimer un policier qui frappe un manifestant, même si on peut lui trouver des circonstances atténuantes et que, comme l’enseignent les Cabalistes, il a certes en lui, comme nous tous, « l’image de Dieu » (Gen. I, 27 ; porter en soi l’empreinte du Plan que Dieu avait de l’homme avant de l’avoir créé) mais, aussi, « l’instinct bestial » (cf. « Séfer Hatania » ; « Orot Hakodech », III, 135), l’ange, et la bête aussi, qu’on doit maîtriser.

Quant à moi, je continuerai obstinément à vous aimer puisque, ne l’oublions pas, nous appartenons tous au même pays auquel je reste farouchement fidèle, comme, d’ailleurs, l’immense majorité d’entre nous, même si certains prétendent le contraire.

Cependant, une chose m’échappe : si j’aime tout le monde, pourquoi l’amour n’est-il pas universellement partagé ? Ce serait si bien et résoudrait tous les problèmes ?!

(Traduit et adapté par Maïmon Retbi, spécialisé dans les sujets kodech, hébreu/français)